mardi 31 mai 2011

C'était dans l'temps

La vogue de la Guillotière

« Les Brotteaux vont avoir aussi leur vogue. Moyennant une somme qu’on dit assez ronde, la municipalité de la Guillotière a accordé toutes les permissions qui lui ont été demandées et les saltimbanques de la Croix-Rousse ont déjà procédé à leur installation sur la place Béranger (Maréchal Lyautey aujourd’hui).
Nous n’avons rien contre le fait lui-même mais on nous permettra de nous élever contre l’envahissement des carrés de verdure qui font le principal ornement de cette place.
Nous voudrions qu’on les eût respectés davantage, qu’on se fût abstenu de construire des baraques sur le sol, nous pensons au moins qu’on aurait stipulé avec les saltimbanques que, le temps de la vogue expiré, les choses seraient remises aux frais de ceux-ci dans leur état primitif. »
Le Nouvelliste Lyonnais du 28 octobre 1848

C'était dans le temps

Pas simple la solidarité ouvrière

Le dimanche 16 août 1846 à 21 h 45 quatre jeunes de la société des Ferrandiniers passaient devant le café de M. Duc, rue Bodin. A l’intérieur une autre société celle dite de « L’Union ». Il va résulter de cette rencontre une lutte dans laquelle l’un des ferrandiniers Barthélemy Poncet va être blessé de plusieurs coups de couteau. Il va se traîner jusqu’au café Baruel, place Saint-Laurent où se trouvait quelques ferrandiniers qui s’empressaient de porter cette triste nouvelle aux autres compagnons réunis chez leur « Mère » rue de Cuire. C’est en masse qu’ils partirent en direction de la rue Bodin. Le commissaire de police Chaumont averti se rendit sur les lieux et parvint à calmer les esprits jusqu’à l’arrivée de deux détachements de troupe de ligne qui contribuèrent à rétablir l’ordre.
Source : L'Echo de l'INdustrie du 28 08 1846

lundi 30 mai 2011

C'était dans l'temps

La maison de tolérance de la rue du Mail

Le 17 janvier 1846 le journal L’Echo de l’Industrie publie un article concernant des scènes scandaleuses qui auraient eu lieu dans le voisinage de la maison de tolérance de la rue du Mail. Aussitôt l’adjoint au maire de la Croix-Rousse Monsieur Clapisson qui fait à se moment là fonction de maire, écrit au rédacteur en chef pour réfuter ces allégations. Rappelant que l’administration municipale « se fera toujours un devoir d’exercer la plus active vigilance sur les maisons de tolérance et de réprimer de la manière la plus sévère le scandale qu’elles pourraient occasionner » adresse ce conseil au rédacteur en chef Eugène Favier : « je vous prie d’être dorénavant moins crédule, plus confiant dans l’administration municipale… »
Parfois il faut être prudent ; le 26 mars 1849 Monsieur Clapisson sera condamné à un an de prison et 1 000 frs de dommages et intérêts pour avoir falsifié le vin qui était en dépôt dans son entrepôt à Serin. Il compensait le vin dérobé par de l’eau !

dimanche 29 mai 2011

C'était dans l'temps

A propos de la Poste
« L’administration de la Poste se propose d’introduire dans le service des dépêches de nouveaux délais d’acheminement. Etranges progrès. Le service Lyon Mulhouse qui se fait actuellement en 23 heures se fera aux termes de l’adjudication en 36 heures ce qui dans la pratique équivaut à un délai de 40 h environ. Le service Lyon Bordeaux qui était de 39 h se fera par entreprise particulière en 57 h ce qui vaudront à peu près 65 h et probablement davantage dans la mauvaise saison. »
L’Avenir du Peuple du 28 octobre 1848

C'était dans l'temps

Et si le tunnel de la Croix-Rousse avait été un canal…

Le 20 juin 1831 est présenté au maire de Lyon Prunelle le projet d’un canal souterrain à pratiquer sous la colline de la Croix-Rousse pour la jonction entre le Rhône et la Saône. Ce même projet sera de nouveau sur le bureau du préfet Gasparin le 12 octobre 1833. On sait aujourd’hui qu’il ne sera pas retenu et qu’en lieu et place sera percé le tunnel routier, mis en chantier en 1939 et inauguré le 20 avril 1952 par le maire de Lyon Edouard Herriot et le président du Conseil Antoine Pinay. Ce canal envisagé n’était-il qu’un projet utopique ? A-t-il donné lieu à une étude sérieuse ? Peut-on regretter qu’il n’ait pas abouti ? A cette dernière question, les habitants du quartier de Serin et du Cours d’Herbouville acquiesceront sans doute. Mais au lecteur de se faire une idée sur la fiabilité de ce projet des plus écologiques grâce à une série d’articles parue en 1835 dans le journal l’Echo du Prolétaire.
Ce qui motive en premier lieu le concepteur du projet, Annet Bigaud, se sont les inondations et se qu’elles entraînent : « La ville de Lyon et les communes de la Guillotière et de Vaise ont fréquemment à souffrir des inondations du Rhône et de la Saône. Outre les dévastations que causent ces débordements, ils ont encore l’inconvénient de laisser, après eux dans les bas-fonds qu’ils ont envahis, des eaux qui, à la longue, deviennent insalubres, et exhalent des miasmes morbifiques. C’est ainsi que le Rhône et la Saône, naturellement destinés à faire l’ornement et la richesse de la cité lyonnaise, compromettent la santé et la fortune de ses habitants. » Ces inondations ont été étudiées : « 1° l’inondation du Rhône s’effectue en 24 et 48 heures, et qu’elle se retire aussi promptement qu’elle est venue ; 2° que la crue de la Saône dure 9 jours, quelquefois 18 et même 27 jours et qu’elle est aussi lente à rentrer dans son lit qu’à en sortir ; 3° que les crues du Rhône et de la Saône sont rarement simultanées et que généralement elles se succèdent. » De ses observations il conclu qu’en ouvrant un canal souterrain sous la colline de la Croix-Rousse, on obtiendrait par là l’écoulement du trop plein du Rhône dans la Saône et réciproquement. Reste à savoir où et comment. « Le canal serait percé souterrainement comme l’on été la canal de Givors, celui de Saint-Maur, comme les chemins de fer. En ligne droite, sous les murs de la ville, de la barrière de Serin à celle de Saint-Clair. » Après avoir précisé les dimensions de la « montagne de la Croix-Rousse », 1900 mètres de la rive de la Saône à celle du Rhône et 85 mètres de hauteur, il envisage une percé de 60 pieds de largeur dont 40 pour le lit du canal et 10 pour chacun des chemins latéraux. Ces chemins latéraux seront destinés au public et au service de halage. Quand à la voûte à ogive « elle aurait 28 pieds de hauteur. » Le lit du canal serait profond de 18 pieds et les chemins latéraux devront être de 48 pouces en contrebas des eaux du fleuve ou de la rivière. Annet Bigaud précise évidemment « qu’en cas de débordement, ce percé ne serait plus ni un canal ni une route, mais bien une rivière portant du Rhône à la Saône et vice versa les eaux surabondantes, et diminuant ainsi pour les rives respectives les dangers de l’inondation. » Le concepteur de ce projet qui aurait pu changer la Ville de Lyon, ne voit que des avantages. « La position de ce canal serait unique en France. On ne saurait, en effet, en trouver une plus favorisée par la nature. Placé à l’entrée d’une cité qui est la seconde du royaume pour la population, et la première par le commerce et l’industrie, joignant un fleuve et une rivière, aboutissant à deux grandes routes, contigu à plusieurs points ; ce canal promet au commerce lyonnais une nouvelle ère de prospérité, les avantages que les populations doivent en retirer sont incalculables. »
Pour Annet Bigaud ce canal n’exigerait point d’entretien. Et en plus « il ne serait point comme tant d’autres canaux qui restent plusieurs mois de l’année fermés, soit par manque d’eau, soit par la rupture des digues, soit par le curage. Taillé à plus des trois quarts dans le rocher, et pour le surplus dans un granit presque aussi dur, quoique en partie rocailleux, il ne donnera pas une heure de travail ni un centime de dépense par année. Sa construction devra au surplus être telle que l’on puisse au besoin en retirer les eaux. Cette opération s’exécuterait à l’aide d’une simple machine hydraulique modelée sur celles dont on fait usage en Hollande. Mise en mouvement par le courant, soit du Rhône, soit de la Saône, cette machine n’aurait pas fonctionné 10 heures consécutives que le lit du canal se trouverait à sec. Il pourrait être rempli de nouveau en 10 minutes. » Il est convaincu que lorsqu’un tel projet aura été étudié sous le rapport des avantages généraux qui y sont signalés, et sous celui des développements immenses dont il est susceptible, son adoption ne pourra faire l’objet d’aucun doute. Annet Bigaud est même persuadé qu’un grand nombre de riches propriétaires s’empresseront de participer à une entreprise monumentale si utile à la population lyonnaise, et dont l’exécution sera si glorieuse pour ses fondateurs.


Cette série d’articles concernant le canal de la Croix-Rousse nous permet également de connaître un peu mieux l’activité fluviale dans les années 1830. On apprend par exemple qu’il passe par an, au bureau maritime de Serin, 19 à 20 mille bateaux, pour lesquels il se fait une dépense journalière de 2, 3 et 400 fr. occasionnée par les équipages soit d’hommes, soit de chevaux nécessaires au halage de chacun d’eux. Les bateaux qui arrivent à Lyon par Serin pour être chargés ou déchargés sur les rives du Rhône, et ceux qui descendent le Rhône pour apporter leur charge sur les quais de la Saône sont obligés de doubler le « cap de la Mulatière » ou de faire le transport de leur cargaison par charrettes. Il faut un jour entier pour le trajet d’un bateau vide de St-Clair à Serin, il faut, outre les eaux et le vent favorables, employer un équipage de plusieurs hommes. Un bateau chargé de bois ou de charbon, qui doit se rendre de Serin jusqu’en amont du pont Morand, coûte à son propriétaire 200 à 350 fr. de frais, outre les risques et les inquiétudes pendant… trois jours ! Les blés et les grains de la Lorraine, de la Bourgogne et de la Bresse arrivant par la Saône pour être moulus à Lyon, doivent, de toute nécessité, être voiturés par terre des quais de la Saône aux moulins du Rhône. La difficultés et les frais du transport sont tels qu’on ne voit généralement pas sur les ports du Rhône, des pierres de Tournus et de Couzon, ni des tuiles, des carreaux, des foins et des pailles, des radeaux de bois de chêne de Bourgogne. On découvre également que la voie publique est souvent encombrée par le transport de grosses et longues pièces de bois que l’on débarque à Vaise et qui sont conduites soit à St-Clair, soit aux Brotteaux, « offrant aux passants une continuelle perspective de danger. »
Outre cette description qui vise bien entendu à argumenter le projet du canal d’Annet Bigaud, il est également question de l’eau que renferme le plateau croix-roussien. Et c’est l’occasion de choses étonnantes. En effet pour le concepteur, il va de soi que lors du percement de « la montagne de la Croix-Rousse, cette admirable entreprise, en découvrant un grand nombre de sources, d’excellentes eaux, résoudra infailliblement et avec succès le problème de la fourniture de l’eau nécessaire à la consommation de la grande majorité des habitants de Lyon. » Notre concepteur voit la possibilité de « recueillir toutes les sources en un ou plusieurs vastes réservoirs pratiqués de chaque côté de la voûte du canal. Leurs produits en seraient tirés au moyens de procédés hydrauliques et conduits à d’autres réservoirs dans l’intérieur de la ville. » Car déjà à cette époque on sait que la colline de la Croix-Rousse renferme, à différents niveaux, une immense quantité d’eau. « On peut s’en convaincre par le grand nombre de puits qui y existent. Ces puits offrent en profondeur 19, 27, 31, 38, 52 et 108 pieds ; un seul porte 131 pieds » précise-t-il. Une eau paraît-il « non moins légères et salubres que celles de la Chana et de St-George ». Mais ce n’est pas tout. Ce canal pourrait bien servir à d’autres activité. Bigaud ne manque pas d’imagination. Qu’écrit-il ? : « Le percé de la montagne offrira, sous sa voûte, une gare des plus utiles aux Brotteaux, contre les glaces, un abri sûr pour toute espèce de marchandises contre les pluies, les gelées, les neiges et même les vols. » Mais ce n’est pas tout. Il y a plus surprenant. L’on sait que depuis des décennies on cherche à savoir l’origine des fameuses « arrêtes de poissons » galeries souterraines sur la partie orientale de la colline. Et bien voilà ce que propose Annet Bigaud en 1835 : « Des galeries parallèles à sa direction (du canal) pourraient être ouvertes sur les parties latérales. Les dimensions et la position de ces galeries seraient différentes d’après l’usage auquel on les appliquerait. Dans l’endroit le plus sec on établirait un magasin à poudre ; dans les endroits humides seraient placés des réservoirs d’eau, des glacières, des entrepôts de vin, etc., etc. Un souvenir des plus tristes vient à l’appui de cette perspective d’utilité générale. L’arsenal de Lyon, à l’époque du siège, fut réduit en cendres. Un canal voûté comme il a été dit, aurait alors sauvé la fortune publique. Lyon pourrait un jour être assiégé ; il convient qu’il ait une retraite à l’épreuve du boulet et de la bombe, pour recéler ses archives, sa bibliothèque, ses tableaux et tout ce que la propriété publique ou particulière offre de plus précieux. » Etonnant non ?

L'apport social des canuts

Avril 1833 annonce les futures organisations syndicales

Dans cet extraordinaire laboratoire social qu’est l’Echo de la Fabrique, quelques articles parus en avril 1833 retiennent l’attention. Ils annoncent un tournant important dans la prise de conscience ouvrière de la nécessité de dépasser les clivages corporatistes pour aboutir à une solidarité prolétarienne. Cette étape essentielle dans l’histoire des travailleurs est d’autant plus forte, plus symbolique qu’elle est franchie à l’occasion du conflit des ouvriers tailleurs de pierre. Or le compagnonnage qui était le mode d’organisation et de défense des ouvriers est né des tailleurs de pierre. Il y a là une véritable rupture avec les pratiques historiques des travailleurs manuels. Ces quelques textes d’avril 1833 permettant de comprendre ce qui est en train de naître à Lyon.

L’Echo de la Fabrique du 7 avril 1833 réagit vivement quand il apprend que 3 ouvriers tailleurs de pierre sont arrêtés pour le délit de coalition.
« Les ouvriers tailleurs de pierre ont fait, il y a près d’un mois, des conventions avec les maîtres tailleurs de pierre : un tarif a été librement arrêté entre eux tous. Quelque temps après un sieur Rivière, signataire des conventions, n’a plus voulu s’y soumettre ; ses ouvriers ont quitté son chantier et ont cherché ailleurs un travail mieux rétribué. Rivière a porté plainte, et les sieurs Châtelet, Morateur et Breysse ont été arrêtés comme coupables de coalition et coupables en outre d’avoir fait cesser le travail dans le chantier de Rivière. Ces trois pères de famille ont paru devant le tribunal correctionnel après huit jours de détention. Le tribunal les a acquittés et n’a pas même cru devoir entendre leur défenseur, Me Chanay. Ils pensaient être mis en liberté, mais le procureur du roi a interjeté appel, et des hommes qui sont nécessaires à leur famille, sont ainsi détenus préventivement parce que tel est le bon plaisir de M. Chegaray. Il a, nous le savons, usé de son droit, mais le vice de nos lois ne devrait-il pas être amendé par la sagesse de nos magistrats. Quel danger y a-t-il pour la société dans la mise en liberté d’hommes qui, s’ils étaient coupables, n’auraient à craindre qu’une condamnation à quelques jours de prison. Pourquoi cette punition préventive, sans utilité pour la société, sans compensation pour les malheureux qui y sont soumis. »
Le journal des canuts rappelle qu’en octobre 1831, pour le même délit, les ouvriers en soie n’avaient pas été poursuivis et encore moins soumis à une arrestation préventive :
« Allons plus loin : les ouvriers tailleurs de pierre ne sont ni plus ni moins coupables que les ouvriers en soie, que les ouvriers tullistes. Les circonstances sont identiques. D’où vient qu’on emploie une manière de procéder différente ? Les ouvriers en soie, les ouvriers tullistes n’ont pas été soumis à une arrestation préventive ; les premiers n’ont pas même été poursuivis. La justice cependant ne doit pas avoir deux poids et deux mesures. Voudrait-on laisser croire que les ouvriers en soie n’ont dû leur liberté qu’à la crainte que leur nombre inspirait, et non à la justice de leur cause, à la sympathie du pouvoir pour la classe prolétaire ? De deux choses l’une, ou M. Varenard ne fit pas son devoir en octobre 1831, ou M. Chegaray fait plus que le sien en mars 1833. »
Puis l’Echo de Fabrique précise son rôle :
« Les ouvriers tailleurs de pierre trouveront dans l’Echo de la Fabrique un appui naturel à leur cause ; car nous nous empressons de leur l’offrir ; car nous ne voulons pas qu’on oublie que l’Echo de la Fabrique, quoique journal d’une industrie spéciale, est aussi celui de la classe laborieuse tout entière ; il est la tribune du prolétariat. Toutes les industries sont solidaires pour la répression des abus, des privilèges, pour l’adoption de ce principe sacré qui fait la base du droit des hommes salariés VIVRE EN TRAVAILLANT. »
Enfin les tailleurs de pierre vont écrire au journal ce texte fondamental. L’Echo l’accompagne d’une présentation intéressante sur l’esprit qui anime les journalistes
« Nous publions sans commentaire l’adresse suivante des ouvriers tailleurs de pierre aux ouvriers en soie, car nos paroles seraient trop au-dessous des sentiments que sa lecture fait naître.
Nous remercions, en ce qui nous concerne, les ouvriers tailleurs de pierre du souvenir honorable qu’ils veulent bien nous accorder. Il nous est doux de recevoir au milieu du combat et avant la victoire, le salaire de nos faibles mais consciencieux travaux.
Nous avons encore beaucoup à faire pour être dignes de cette récompense ; nous le ferons. Nous puiserons de nouvelles forces dans ce témoignage de la sympathie de nos concitoyens. Forts de cet appui que nous trouvons dans l’opinion publique, nous continuerons, sans craindre les entraves que les ennemis de la cause sacrée à laquelle nous avons voué notre existence, pourraient nous susciter, nous continuerons à marcher d’un pas ferme vers le but que nous nous sommes proposé : L’EMANCIPATION PHYSIQUE ET MORALE DE LA CLASSE PROLETAIRE. Dieu et la liberté nous soient en aide. God and liberty (Voltaire à Franklin).
Aux ouvriers en soie.
Nous nous empressons de vous manifester notre reconnaissance pour la généreuse sympathie que vous avez témoignée pour nos frères détenus : le journal qui s’est spécialement consacré à la défense de vos intérêts, s’est hâté de nous offrir son appui ; nous sommes heureux et fiers de cette bienveillance. Le temps n’est plus où nos industries se poursuivaient d’injures et de violences mutuelles ; nous avons enfin reconnu que nos intérêts sont les mêmes, que loin de nous haïr, nous devons nous aider, et qu’un esprit de confraternité doit nous unir tous. De tant de faisceaux séparés ne formons qu’un seul faisceau : les travailleurs ne peuvent améliorer leur sort que par une association toute fraternelle ; puisse votre exemple amener enfin l’oubli de toute funeste rivalité ; puissent toutes les professions se donner la main ! A vous appartiendra l’honneur d’un aussi noble résultat.
Recevez en particulier, M. le rédacteur, l’expression de notre gratitude pour vos généreux et constants efforts en faveur de la cause sainte de l’émancipation des prolétaires.
Pour nos frères, les tailleurs de pierre :
Signés : Savigny, Doyen, Tissier cadet, Tissier aîné, Baron, Berger, Taboulat, Louis Aimard, Gentil, Respaux, Boiron, Cousin, Pain, Mouchard, Bourgeois, Bidault, Berset, Vallèle, Perrin, Sourd père, Sourd fils, Trouvet, Michelon, Guillermin, Pilloud, Escudié, Goujon, Hourlat, Goubre, Perruquet, Imbert, Aspet, Guillaume, Aubriaque, Uze, Carret, Peterre, Drevet, Perrin cadet, Deschamp, Lefroid, Chabout, Venture, Chatte, Faure, Chapotton, Constant, Constantin, Bellevêque, Durand, Barthès, Lizet fils, Marchand, Michelon, Berguirailles, etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc., etc. »

La vogue de la Croix-Rousse

« La vogue de la Croix-Rousse avait attiré une immense affluence sur la Grande Place de cette commune. Le bruit des détonations et de la musique en plein vent des saltimbanques qui la peuplent en ce moment, était devenu tellement assourdissant que les habitants s’étaient vu forcés dans l’intérêt de leurs oreilles, d’abandonner leurs logis. Nous avons cependant à louer l’arrêté qui avait proscrit, dimanche passé, tous les jeux dit de hasard. On ne saurait prendre des mesures trop sévères contre cette adroite fourberie qui, sous l’appât d’un gain problématique, offre un piège grossier où d’honnêtes travailleurs vont engloutir, souvent dans quelques heures, les ressources de toute une semaine. »
L’Echo de l’Industrie en 1845

C'était dans l'temps

Histoire de latrines
Les habitants et propriétaires de la place des Terreaux ont signé une pétition adressée à M. le Maire contre une idée singulière de l’Administration. Nos lecteurs auront peine à croire que dans ce moment on construit sur la place des Terreaux des latrines publiques. La manie des améliorations de ce genre est parvenue à un tel degré de fanatisme que bientôt toutes nos places ne seront plus à l’abri de son envahissement.
L’Echo de l’Industrie de 1845.

samedi 28 mai 2011

La mairie actuelle du 4ème arrondissement

La mairie du 4ème arrondissement

Le bâtiment de la mairie du 4ème arrondissement est étroitement lié à l’histoire du boulevard de la Croix-Rousse. En effet le 20 juin 1865, Napoléon III déclare que « les fortifications n’ont plus aucune raison d’être ; elles sont inutiles contre l’ennemi et nous sommes plus au temps où l’on se croyait obligé d’élever de redoutables défenses contre l’émeute. » Une déclaration très politique puisqu’il ne manque pas d’ajouter en souhaitant remplacer les remparts (en partie déjà démolis) par un boulevard de 40 mètres de large et planté d’arbres : «… témoignage de sa confiance dans le bon sens et le patriotisme de la population lyonnaise. »
Il est à noter qu’en 1842 était projeté un Hôtel de Ville (La Croix-Rousse a le statut de Ville jusqu’en 1852) sur l’ancien terrain du jeu de mail faisant partie des fossés de la ville de Lyon.
En 1866 l’ingénieur Bonnet présente le projet du boulevard qui suivra celui des fortifications, les bastions devenant les places (Tabareau, des Tapis, Claude Joseph Bonnet…)
En 1867 commencent les travaux du boulevard de la Croix-Rousse. La Ville va renoncer à prolonger la rue Duviard jusqu’au boulevard et conserve un îlot assez étendu de 2000 m2. Ce terrain en raison de sa position centrale sur le boulevard, de sa proximité avec le quartier peuplé, de sa superficie va être utilisé pour la construction de la nouvelle mairie.
La construction se fait de 1867 à 1869. Elle va abriter les services d’état civil, de la justice de Paix, la Caisse d’Epargne de la Croix-Rousse et la gendarmerie.
Jusque dans les années 1970 la mairie abritera également la bibliothèque dans ce qui est aujourd’hui la salle du Conseil. La Caisse d’Epargne de la Croix-Rousse a récemment « immigrée » sur le 1er arrondissement et perdue sa spécificité de Caisse d’Epargne… de la Croix-Rousse. Elle occupait ce qui est aujourd’hui les services d’Etat Civil. Ceux-ci étant au 1er étage.
Je peux assurer qu’en 1962 le Conseil de révision se tenait dans la mairie.
C’est en 1948 que les Dejean, père et fils, apposèrent les deux plaques célébrant les Voraces de 1848 et les Révoltes des tisseurs sur soie de 1831 et 1834.
A la Libération des femmes accusées de collaboration furent « exposées » tondues, sur le parvis.
En mai 1968 un comité de quartier improvisé se tenait devant la mairie. Il affichait notamment le prix des légumes du marché relevés le matin de bonne heures afin d’éviter les hausses brutales. Ce même comité voulu occuper symboliquement la mairie. Le pouvoir en place à cette époque refusa et fit jouer la présence de la Caisse d’Epargne et l’argent qu’elle avait dans ses coffres.